Près de 100.000 personnes manifestent à Londres contre le soutien des États-Unis et du Royaume-Uni au génocide israélien à Gaza.

Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté à Londres samedi pour s’opposer à la destruction génocidaire de Gaza par Israël.

La marche s’est rassemblée dans le quartier des banques de la capitale et a longé la Tamise avant de se terminer par un rassemblement près du Parlement à Whitehall, le siège du gouvernement britannique.

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L'événement avait lieu après le rejet par les États-Unis vendredi aux Nations Unies d’une résolution appelant à un cessez-le-feu. La Grande-Bretagne s'est une nouvelle fois alignée sur Washington et a refusé de soutenir la motion en s'abstenant, un représentant de Downing Street affirmant que cela était dû au fait que la résolution ne condamnait pas le Hamas.

Ont participé à la manifestation des milliers de jeunes suite à leurs débrayages dans les écoles et les établissements d'enseignement supérieur ces dernières semaines dans diverses villes, petites et grandes.

Des manifestants au rassemblement à Whitehall, Londres, 9 décembre 2023

La Police métropolitaine de Londres [ou ‘Met’] a de nouveau mobilisé massivement ses agents, mettant en place des restrictions sur une grande partie de Londres. Elle a déclaré dans la journée qu’«un ordre de dispersion en vertu de l’article 35 de la loi sur les comportements antisociaux, la criminalité et le maintien de l’ordre (Antisocial Behaviour, Crime and Policing Act) [était] en place jusqu’à 1 heure du matin dans la zone… Toute personne se trouvant dans la zone et à qui un agent demande de partir et qui ne le fait pas peut être arrêtée». Des «ordonnances au titre des sections 60 et 60 AA de la loi sur la justice pénale et l’ordre public» étaient également en vigueur dans la même zone. Celles-ci confèrent aux agents des pouvoirs de fouille supplémentaires pour prévenir la violence et les troubles, ainsi que le pouvoir d’ordonner qu’on découvre son visage.

À 17 heures, la police avait procédé à 13 arrestations, «la plupart pour des pancartes offensantes». Elle a déclaré: «Alors que le cortège se formait, des agents ont identifié un homme portant une pancarte établissant des comparaisons entre Israël et l’Allemagne nazie. Il a été arrêté pour suspicion d’atteinte à l’ordre public aggravée par des considérations raciales». Cette semaine-là, des millions de personnes ont été choquées par des images montrant des soldats des Forces de défense israéliennes forçant des prisonniers palestiniens à se déshabiller jusqu’aux sous-vêtements, tout en les surveillant à la pointe du fusil — un acte que beaucoup comparent aux humiliations et atrocités commises par le régime hitlérien.

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Révélant le vaste réseau de surveillance de la population mis en place par la Met et d’autres forces de police, la police londonienne a déclaré: «Les agents de notre équipe de surveillance spécialisée “Voyager”, qui scrutent la foule, ont pu identifier une femme recherchée pour un délit commis au cours d’une manifestation le 28 octobre. Ils ont guidé les officiers pour procéder à une arrestation et cette femme est maintenant en détention».

Le rassemblement a été introduit par une vidéo du Dr Mustafa Barghouti, leader de l’Initiative Nationale Palestinienne, un parti politique palestinien. Il a déclaré: «Israël est entré dans le troisième mois de son agression contre Gaza. Il utilise toutes les forces dont il dispose. 11.000 frappes aériennes jusqu’à présent. 45.000 tonnes d’explosifs ont été lancées sur Gaza, soit 17 kg par homme, femme et enfant. Ils ont déjà tué plus de 16.000 personnes, 22.000 en réalité si l’on compte celles qui se trouvent sous les décombres, dont pas moins de 10.000 enfants. C’est un terrible crime de guerre».

John McDonnell prend la parole au rassemblement de samedi à Londres

La manifestation s’est distinguée par le très petit nombre de représentants du Parti travailliste présents, même par rapport aux rassemblements précédents. Parmi les députés travaillistes en exercice, seuls Apsana Begum et John McDonnell étaient présents à la tribune. Ni l’un ni l’autre n’ont mentionné le soutien de leur propre parti au génocide, et ils ont à nouveau refusé de mentionner le nom du chef du parti, Sir Keir Starmer, ou son soutien aux crimes de guerre israéliens. Le discours de McDonnell était dépourvu de toute dimension politique, puisqu’il a lu une lettre de lui, comme «père et grand-père», aux «chers enfants» de Gaza. La lettre disait «Vous n’êtes pas seuls, nous sommes votre famille à présent».

L’ancien dirigeant du Parti travailliste Jeremy Corbyn, qui siège aujourd’hui au Parlement en tant qu’indépendant après avoir été exclu du groupe parlementaire pendant plus de trois ans pour avoir critiqué la chasse aux sorcières bidon contre l’antisémitisme « de gauche», a pris la parole au rassemblement. Présenté comme «Premier ministre du peuple», Corbyn a condamné le veto américain à la motion de cessez-le-feu de l’ONU et l’abstention de la Grande-Bretagne, les qualifiant de «jour de honte mondiale». Il a déclaré que «les gouvernements occidentaux ne peuvent pas voir qu’ils sont complices, complices, de l’assassinat de tant de Palestiniens par leur fourniture d’armes et leur refus de faire quoi que ce soit pour exiger un cessez-le-feu».

Jeremy Corbyn lors du rassemblement du 9 décembre 2023 à Londres

Corbyn ne risque aucune sanction de la part de Starmer pour dire quoi que ce soit, car il ne fonctionne plus sous la discipline du parti depuis des années. Les stipulations de la discipline collective du cabinet fantôme ne s’appliquent pas à lui non plus, car il est simple député depuis que Starmer a pris ses fonctions. Mais il a une fois de plus refusé de nommer Starmer ou le Parti travailliste comme partisans du génocide, comme l’a confirmé le vote du 16 novembre au Parlement, lorsque près des trois quarts des députés travaillistes se sont opposés à une motion en faveur d’un cessez-le-feu. Au lieu de quoi Corbyn a déclaré, en pointant du doigt Westminster: «Je dis à mes collègues du Parlement: ‘Honte à vous, honte à vous, parce que vous n’êtes pas prêts à voter en faveur d’un cessez-le-feu. Honte à vous qui ne faites rien contre le commerce des armes qui alimente cette guerre’».

C’est dans ce contexte que la Coalition stoppez la guerre (Stop the War Coalition – STWC), co-organisatrice de la manifestation, a insisté pour dire que gagner le soutien des partis parlementaires de l’impérialisme britannique restait l’objectif prioritaire de toute mouvement de protestation contre le carnage à Gaza.

Banderole sur la scène indiquant «Pas de cessez-le-feu, pas de vote».

Alors que seuls 56 députés travaillistes soutiennent une motion de cessez-le-feu sans effet, et à quelques mois des élections, Alex Kenny, membre exécutif du Syndicat de l’éducation nationale, a été le premier à proposer cette fiction que les travaillistes pourraient être forcés de changer du tout au tout alors que des milliers de personnes continuent d’être massacrées par les forces de défense israéliennes: «Nous savons qu’il y aura des élections législatives l’année prochaine et je tiens à saluer la présence sur scène de cette banderole derrière notre prochain orateur, Lindsey [German]: “Pas de cessez-le-feu, pas de vote”. C’est ce que nous devons dire. Si vous continuez à vous abstenir, vous ne pourrez pas compter sur notre vote aux élections législatives».

German, coordinateur du STWC et membre dirigeant du groupe pseudo-de gauche Counterfire, a déclaré: «Nous avons un message très fort à adresser aux hommes politiques de ce pays qui ne soutiendront pas un cessez-le-feu. Lors des élections, la Palestine sera sur le bulletin de vote et s'il n'y a pas de vote pour un cessez-le-feu, il n'y aura pas de vote pour les politiciens qui refusent de le faire ».

Lindsey German s'exprime lors de la manifestation de Londres, 9 décembre 2023

La Coalition Stoppez la guerre a renforcé le message en repostant sur X/anciennement Twitter, un message de German qui avait écrit, à côté d’une photo du ministre des Affaires étrangères fantôme travailliste, David Lammy, «Il est temps de passer à la vitesse supérieure: pas de cessez-le-feu, pas de vote».

(Article paru d’abord en anglais le 11 décembre 2023)

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