«C'était une manoeuvre politique [...] il n'a rien dit au sujet des travailleurs qui ont perdu leur emploi»

Les travailleurs de l'automobile répondent au président de l'UAW lors de la présentation de l'état de l'Union de Biden

Shawn Fain, dirigeant de l'United Auto Workers, était l'invité d'honneur du président Biden lors du discours sur l'état de l'Union la semaine dernière. Biden a présenté Fain comme un « grand ami et un grand dirigeant syndical » et a affirmé que l'UAW, avec l'aide de son administration, avait empêché la fermeture d'une usine automobile à Belvidere, dans l'Illinois, et obtenu 4000 nouveaux emplois lors des négociations contractuelles de l'automne dernier.

Après son intervention lors du discours sur l'état de l'Union, Fain a donné des interviews à MSNBC, à The Nation et à d'autres organes de presse, où il a fait l'éloge du président démocrate, complice de longue date de l'Amérique des affaires, le qualifiant de défenseur inébranlable de la classe ouvrière.

Loading Tweet ...
Tweet not loading? See it directly on Twitter

La différence entre Biden et Trump, a-t-il déclaré à The Nation, est la suivante : « L'un se tient aux côtés de la classe ouvrière, et l'autre représente la classe des milliardaires – et en fait partie – se fiche éperdument de la classe ouvrière. »

Les sondages montrant que Biden est à la traîne de Trump, Fain est devenu l'un des principaux porte-parole du président. Ce faisant, il a dissimulé le soutien de Biden à la guerre génocidaire d'Israël à Gaza et l'offre de Biden de travailler avec Trump pour faire passer les mesures anti-immigration les plus réactionnaires de l'histoire des États-Unis en échange du soutien républicain à l'expansion de la guerre des États-Unis et de l'OTAN contre la Russie en Ukraine, qui menace le monde d'une guerre nucléaire.

Dans le même temps, Fain et Biden continuent de perpétuer l'affirmation selon laquelle la fausse « grève debout » de l'UAW – en réalité, une non-grève qui a maintenu la plupart des travailleurs au travail – a permis d'obtenir des gains « historiques » pour les travailleurs de l'automobile. Il s'agit notamment de la conversion supposée des travailleurs supplémentaires (temporaires) en travailleurs à temps plein et de la fin des « temporaires permanents ».

En fait, quelques jours avant le discours sur l'état de l'Union, Stellantis a licencié 341 travailleurs temporaires dans son complexe d'assemblage de Toledo, dans l'Ohio. Ils font partie des plus de 2300 travailleurs supplémentaires que Stellantis licencie définitivement avec la pleine bénédiction de la bureaucratie de l'UAW.

Les travailleurs contactés par le World Socialist Web Site étaient furieux des louanges faites à Fain par Biden. Natalie, une travailleuse supplémentaire récemment licenciée au Detroit Assembly Complex, a déclaré que Fain « a été absent de l'action chez Stellantis, mais je le vois ensuite avec le président lors de l'état de l'Union, où il a été louangé ».

« C'était une manoeuvre politique. Il n'est pas allé à Detroit. Il n'a pas abordé nos problèmes. Je n'ai rien vu de ce qu'il a fait. Je n'ai pas vu de tract. Je n'ai pas vu de vidéo. Je ne l'ai pas vu parler de ce qui est arrivé aux travailleurs qui ont perdu leur emploi et qui ne peuvent pas subvenir aux besoins de leur famille. »

Natalie a ajouté : « Je suis une ouvrière de l'automobile de la troisième génération de l'UAW et je me réjouissais de travailler chez Stellantis. Mais la convention collective n'était pas ce qu'ils avaient promis. J'avais l'espoir et le rêve d'avoir ma permanence. Aucun TPT n'a été converti. J'étais censé passer d'un emploi temporaire à temps partiel à un emploi temporaire à temps plein et, après neuf mois, à un emploi à temps plein. Lors de la réunion du syndicat local, ils nous ont dit que nous obtiendrions une participation aux bénéfices en 2024 sur la base des heures travaillées en 2023. C'était également un mensonge.

« Ils nous ont pris nos cotisations syndicales pendant tout ce temps et ils ont laissé l'entreprise nous mettre à la rue. Je suis resté moins d'un an et j'ai dû payer plus de 1000 dollars de cotisations syndicales. Dès que notre salaire est passé à 21 dollars de l'heure, ils ont commencé à prélever 54 dollars de cotisations syndicales.

« Nous sommes utilisés comme des pions par Stellantis. Partout aux États-Unis et dans le monde, les travailleurs ne sont pas traités équitablement ». Rappelant les récentes grèves des travailleurs italiens de Stellantis contre les suppressions d'emplois, elle déclare : « Où qu'ils soient, les travailleurs ne tolèrent pas d'être traités comme des déchets. C'est ce que je ressens. J'ai littéralement mis ma sueur et mon sang dans la construction de véhicules, et j'ai des cicatrices sur mon corps où j'ai dû aller chez le médecin. J'ai transpiré pendant les chaudes journées d'été, lorsqu'il faisait 40 degrés dans l'usine. J'ai pleuré au travail. Ce n'est pas juste.

« L'entreprise a réalisé un chiffre d'affaires de 20 milliards de dollars l'année dernière. Ford et General Motors aussi. Nous n'avons obtenu les 21 dollars de l'heure qu'en novembre. Quarante heures par semaine de 21 dollars, ce n'est pas beaucoup. Je n'ai ramené que 600 dollars à la maison la semaine dernière. Même en faisant des heures supplémentaires, je n'ai jamais atteint les 1000 dollars par semaine. »

Commentant l'apparition de Fain lors du discours de Biden sur l'état de l'Union, un chauffeur d'une entreprise de distribution de pièces détachées qui sous-traite avec Stellantis à Detroit a déclaré : « L'interdiction de la grève des chemins de fer en 2022 m'a frappé de plein fouet. J'avais l'habitude de voter démocrate, mais lorsque Biden a interdit la grève des cheminots, il m'a perdu. Je ne voterai plus jamais démocrate. »

Un travailleur de Stellantis récemment licencié de l'usine d'assemblage de Sterling Heights, dans la banlieue de Detroit, a déclaré : « Fain est un faux frère. Il faut dire les choses telles qu'elles sont. Il faut s'en tenir à ses actes. J'étais censé passer à temps plein après le contrat de 2019, mais je n'ai jamais eu ma permanence. On dirait qu’on ne voit Fain que lorsqu'il rencontre le président. »

Suite à l'apparition de Fain, Jerry White, le candidat du Parti de l'égalité socialiste à la vice-présidence des États-Unis, a posté ce qui suit sur son compte X :

Loading Tweet ...
Tweet not loading? See it directly on Twitter

Afin d'étoffer ses qualifications « pro-ouvrières », Joe Biden a invité son laquais bureaucratique préféré, le président de l'UAW Shawn Fain, à l'occasion de l'état de l'Union. Il l'a qualifié de « grand ami et grand dirigeant syndical ».

Fain s'est levé et a tenté absurdement de prendre une pose militante, levant le poing tout en accueillant les louanges. Quelques instants plus tard, Biden a fait une remarque honnête sur Wall Street : « Ce ne sont pas de mauvaises personnes ».

Quelques minutes plus tard, s'adressant à nouveau à ses auditeurs de l'aristocratie financière, il a déclaré : « Écoutez, je suis un capitaliste. Si vous voulez gagner un million de dollars, tant mieux ! »

Comment expliquer cette apparente contradiction ? Biden, longtemps connu comme « le sénateur de la société DuPont », s'est appuyé sur l'UAW et d'autres bureaucraties syndicales corporatistes pour étouffer la lutte des classes et donner à l'impérialisme américain les coudées franches pour mener la guerre à l'étranger.

Fain est peut-être un « grand ami » de Biden. Mais il n'est pas un « dirigeant ouvrier » au sens où l'entend cette expression, contrairement à ce que prétend la pseudo-gauche des DSA (qui elle-même occupe aujourd'hui des postes de premier plan dans la bureaucratie de l'UAW).

La « grève debout » de l'UAW en 2023 était une fraude, qui a forcé la grande majorité des travailleurs à rester au travail, et les conventions collectives que le syndicat a imposées aux travailleurs étaient des trahisons. Fain est un fonctionnaire très bien payé de l'appareil corrompu de l'UAW, un homme qui a passé toute sa carrière à imposer les exigences des entreprises aux travailleurs.

Enfin, la servilité du président de l'UAW, Fain, devant Biden lors du discours sur l'état de l'Union devrait mettre un terme à ses prétentions à soutenir un cessez-le-feu à Gaza ou à s'opposer de quelque manière que ce soit à la guerre.

Le discours sur l’état de l’Union de Biden a été une défense à fond des préoccupations centrales de son administration : la guerre contre la Russie, ainsi que les préparatifs de guerre contre la Chine. Fain et la direction de l'UAW ont donné leur appui à « Joe le génocidaire », qui est totalement complice de la guerre génocidaire d'Israël contre Gaza, qui a fait plus de 35.000 morts. En outre, Fain et l'appareil de l'UAW ont refusé d'appeler à la grève leurs membres qui participent à la production d'équipements militaires pour Israël chez Allison Transmission, Caterpillar et ailleurs.

Êtes-vous un travailleur de l'automobile ? Contactez-nous pour obtenir des informations sur la création de comités de base pour lutter contre les suppressions d'emplois et les contrats de trahison.

(Article paru en anglais le 13 mars 2024)

Loading