Le vice-chancelier allemand du parti Vert se donne le titre de «ministre de l’Industrie d’armement».

Les Verts, qui ont commencé il y a 45 ans en tant que pacifistes, ne sont pas seulement devenus le premier parti allemand de la guerre, ils ont également perdu toutes leurs inhibitions.

Robert Habeck [Photo by Michael Brandtner / wikimedia / CC BY-SA 4.0]

Dans une interview accordée lundi à la chaîne de radio Deutschlandfunk, le ministre de l’économie, Robert Habeck, s’est vanté d’être également «ministre de l'Industrie d’armement» de l'Allemagne. «Vous savez à quel parti j'appartiens», a déclaré l’homme politique des Verts, qui est également vice-chancelier. « Je ne m’imaginais vraiment pas que je me fixerais encore comme priorité dans mon travail celle d’être ministre de l'Industrie d’armement, mais c'est ce que je dois faire maintenant ».

Habeck a défini sa nouvelle mission comme celle de «développer l’Industrie d’armement en Allemagne». Il poursuit ainsi: «Si l’Ukraine a besoin d’armes et de munitions, elle doit les obtenir, et si elle n’en a plus besoin […], la Bundeswehr [les forces armées] peut en faire bon usage. Nous devons donc accélérer le rythme, augmenter la cadence et produire davantage». Il s’agissait d’une «décision très, très nécessaire», a-t-il conclu.

Habeck revenait tout juste d’un voyage en Ukraine, où il s’était rendu en compagnie de responsables de plusieurs entreprises d’armement. Il avait auparavant invité des représentants de l’industrie d’armement à son ministère pour y discuter de l’expansion des capacités de production.

S’exprimant sur Deutschlandfunk, il a insisté pour dire que l’Allemagne devait jouer un rôle pionnier en matière d’armement, même si elle était déjà la deuxième fournisseuse d’armes de l’Ukraine après les États-Unis. «Nous devons montrer que nous sommes les premiers à agir, que nous ouvrons la voie, que nous disons que nous pouvons faire un pas de plus», a souligné le politicien Vert.

Habeck, qui est titulaire d’un doctorat en littérature et a travaillé comme écrivain avant de faire carrière en politique, choisit ses mots avec soin. Et il sait de quoi il parle.

Dans l’histoire de l’Allemagne, il n’y a eu qu’un seul ministre de l’Industrie d’armement, sous Hitler. Le 17 mars 1940, six mois après l’invasion allemande de la Pologne, un décret du Führer créait le «ministère du Reich pour l’Armement et les Munitions». Le ministre Fritz Todt, membre du NSDAP (le parti nazi) depuis 1922 et Obergruppenführer des SA (‘troupes d’assaut’), veille à ce que l’économie de guerre couvre les besoins croissants de la Wehrmacht (forces armées).

Après la mort accidentelle de Todt en février 1942, Hitler a nommé son architecte personnel Albert Speer pour lui succéder, sous la direction duquel le ministère est devenu le centre de contrôle central de l’économie de guerre nazie. En septembre 1943, il est rebaptisé «ministère de l’Armement et de la Production de guerre du Reich». Tous les autres secteurs économiques doivent lui être subordonnés. La production d’armement triple entre 1940 et 1944. Le ministère exploite des millions de travailleurs forcés et de prisonniers des camps de concentration, dont seule une minorité survit.

Le fait que Habeck reprenne aujourd’hui cette tradition criminelle en se nommant «ministre de l’industrie d’armement» montre à quel point l’ensemble de la classe dirigeante s’est déplacée vers la droite. En ce tricentenaire de la naissance d’Emmanuel Kant, ce n’est pas l’«impératif catégorique» du célèbre philosophe qui détermine leurs pensées et leurs actions, mais leurs intérêts de classe impérialistes.

Au cours des deux guerres mondiales, l’impérialisme allemand a cherché à satisfaire sa soif de marchés, de matières premières et de main-d’œuvre bon marché en soumettant l’Europe et en s’étendant vers l’est. Aujourd’hui, il suit à nouveau la même voie.

Après deux ans de guerre en Ukraine, que l’OTAN a délibérément provoquée, et six mois de génocide à Gaza, que le gouvernement allemand soutient pleinement, plus personne dans la classe dirigeante n’est en faveur de la ‘retenue militaire’. Le pacifisme, qui mise sur la raison et la bonne volonté des gouvernants, s’avère être une faillite totale.

Rien ne le démontre mieux que la politique belliciste des Verts, le parti de la classe moyenne supérieure aisée et privilégiée. Ils n’ont pas leur pareil pour envelopper une politique de guerre d’encens moral. Mais aujourd’hui, cela prend des formes perverses.

Les Verts soutiennent le massacre des Palestiniens et persécutent tous ceux qui protestent contre le génocide à Gaza en les qualifiant d’antisémites, tandis qu’en Ukraine ils coopèrent dans la guerre contre la Russie avec les adorateurs des collaborateurs nazis et des ennemis des Juifs. Ils enragent à propos de Poutine et Xi tandis qu’au Moyen-Orient, ils se jettent au cou des dictateurs et des meurtriers de masse comme le prince saoudien Mohammed bin Salman et le boucher du Caire Abdel Fatah Al-Sisi.

Le dégoût et la répulsion devant cette politique et l’opposition contre elle augmentent. Mais il est nécessaire de tirer consciemment les leçons de la faillite des Verts. Faire pression sur le gouvernement et la classe dirigeante ne peut arrêter le danger d’une troisième guerre mondiale. Ce qu’il faut, c’est construire un mouvement anti-guerre indépendant, basé sur la classe ouvrière internationale et liant la lutte contre la guerre, les inégalités sociales et le fascisme à la lutte contre leur cause, le capitalisme. C’est ce pour quoi se bat le Sozialistische Gleichheitspartei (Parti de l’égalité socialiste) dans ces élections européennes.

(Article paru en anglais le 27 avril 2024)

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