Perspective

Mobilisons les travailleurs et les jeunes contre l’état d’urgence en Nouvelle Calédonie!

Télécharger au format PDF

Le Parti de l’égalité socialiste (PES) dénonce l’imposition de l’état d’urgence par la France en Nouvelle Calédonie. L’impérialisme français tente d’écraser par la force une révolte sociale provoquée par la crise capitaliste, et notamment l’effondrement des cours du nickel qui domine les exportations de cet archipel du Pacifique, et par le régime néocolonial que Paris y impose.

Arrivé hier dans l’archipel pour discuter avec les dirigeants politiques et coordonner la répression, Macron a promis d’écraser la révolte par la force. Blindés et hélicoptères iront, a-t-il dit, «dans les prochaines heures pour reprendre l’intégralité des points qui sont encore dans le désordre et la violence». Macron a aussi annoncé la censure du réseau social TikTok. Il s’agit des mesures les plus brutales depuis la répression du soulèvement des Kanaks en 1985-6, qui s’est achevée par un massacre de 19 Kanaks sur l’île d’Ouvéa par des troupes d’élite françaises.

Gouvernant par la matraque, Macron se pose avec une hypocrisie boursouflée en champion de la démocratie. Défendant la réforme électorale qui a mis le feu aux poudres en Nouvelle Calédonie, en proposant d’autoriser les nouveaux venus européens à voter dans les élections locales, il a dit: «On est quand même un drôle de pays. En France, on a permis le vote des étrangers [européens, NDLR] aux élections locales… Et là on dit à des gens, qui sont là depuis dix ans, qu'ils n’ont pas le droit de voter aux élections locales».

Les travailleurs en France, dans la région du Pacifique et à travers le monde doivent prendre la défense des Kanaks. Comme lors de son imposition antidémocratique d’une réforme des retraites et et lors des émeutes suite à l’assassinat de Nahel en 2023, l’impérialisme français fait la guerre à la population. Les travailleurs et les jeunes kanaks soulevés sont confrontés d’emblée aux visées géopolitiques et militaires de Paris.

Alors que Washington et ses alliés de l’OTAN mènent une guerre contre la Russie et se préparent à une guerre contre la Chine dans le Pacifique, Macron compte conserver le contrôle des réserves minières comme des bases militaires stratégiques en Nouvelle Calédonie. La nature des intérêts qu’il défend ainsi transparaît dans le soutien prêté par Paris au régime néofasciste en Ukraine pour faire la guerre à la Russie, et au génocide sioniste à Gaza.

Pour mener la guerre impérialiste à l’extérieur, Macron mène la guerre des classes à l’intérieur. L’archipel est touché de plein fouet par la crise du nickel, dont les cours sont en déclin. Une usine du nord a été mise en sommeil avec le départ de l'exploitant Glencore, mettant en péril 1.750 emplois. L’inflation et le chômage dévaste les conditions de vie, et les dirigeants français n’ont rien à proposer, hormis la répression.

La réforme annoncée par Macron a provoqué l’éruption la semaine dernière de la colère sociale et politique, avec des émeutes et occupations de voies publiques. Les autorités locales sur l’archipel, «indépendantistes» ou ouvertement pro-françaises, ont avoué être débordées. Les émeutes ont fait 6 morts dont deux policiers, avec plus de 200 arrestations et plus de 300 blessés dans la capitale, Nouméa, et ses environs.

Les plus grands troubleurs de l’ordre ne sont pas les masses soulevées, mais les bourgeois paniqués et assoiffés de sang. Les élites de la population caldoche (d’origine européenne) organisent des escadrons de la mort rappelant les «ratonnades» visant les Arabes pendant la guerre d’Algérie.

«Une source a depuis précisé au Monde que les deux premiers morts sont deux jeunes Kanak, qui auraient été tués par des caldoches», écrit Le Monde, qui cite un haut-commissaire de police: «Il y a des milices armées qui se constituent pour se protéger». Le journal ajoute:

«‘Milices’, le terme, qui réveille le spectre de la guerre civile des années 1980—les ‘événements—sème l’effroi dans les quartiers à majorité kanak. Sur les messageries instantanées, des rumeurs invérifiables, photos de pick-up aux vitres fumées à l’appui, parlent d’expéditions punitives, dans lesquelles les jeunes Océaniens seraient pris en chasse.»

C’est pour empêcher les masses de télécharger sur les réseaux sociaux des preuves de la criminalité des classes possédantes que Macron censure TikTok.

Les travailleurs en France et du Pacifique doivent se mobiliser en défense des travailleurs et des jeunes soulevés en Nouvelle Calédonie. Il n’y a aucune solution nationale, à l’intérieur de l’archipel, à une crise politique enracinée dans la crise du capitalisme et de l’impérialisme mondial, qui sombrent à nouveau dans une guerre mondiale. Ceci est révélé par la faillite des «indépendantistes» du Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste (FLNKS).

Les dirigeants du FLNKS, liés aux bureaucrates staliniens et social-démocrates en France, se précipitent pour rencontrer Macron et essayer d’étouffer le mouvement parti sans lui, depuis en bas.

Son bureau, en concertation «avec l'ensemble des groupes de pression composant le FLNKS (UC, PALIKA, UPM, RDO)», dit espérer que la visite de Macron «permette d'impulser un nouveau souffle en vue de renouer un dialogue apaisé et serein». Dans un communiqué mercredi, le FLNKS exige le retour au calme, «afin de permettre à nos écoliers et étudiants, à nos concitoyennes et concitoyens les plus vulnérables et, de manière générale, à l'ensemble de la population calédonienne fragilisée par cette situation, de renouer avec la confiance et la sécurité.»

Le FLNKS représente une petite-bourgeoisie autochtone qui n’a aucune aspiration claire, hormis de jouir de leurs privilèges à l'intérieur du système néocolonial, économiquement sclérosé qu’impose la France à l’archipel. Malgré des ressources colossales (20 à 30 pour cent du nickel mondial), l'archipel calédonien n'est que le troisième producteur mondial avec 230.000 tonnes en 2023. Il est très loin derrière l'Indonésie qui avec 1,8 million de tonnes a multiplié sa production par 10 cette dernière décennie, grâce aux investissements chinois.

La loi actuelle sur le corps électoral restreint en Nouvelle Calédonie est réactionnaire, car il divise les travailleurs océaniens, asiatiques et européens de l’archipel. Fruit de l’accord de Nouméa de 1998, négocié par le gouvernement PS de l’époque comme «compromis» entre indépendantistes et anti-indépendantistes, il vise à maintenir le diktat français sur l’archipel. Mais les travailleurs ne peuvent confier la tâche de s’opposer à la réforme du système menée par Macron et ses blindés aux «indépendantistes», qui travaillent de mèche avec lui.

En rencontrant Macron, les «indépendantistes» tendent un piège pour les travailleurs et les jeunes kanaks qui les enchaînent à l’impérialisme français et donc aux préparatifs de guerre de Washington contre la Chine. L’ensemble de la région est une poudrière sociale. En janvier, une vague d’émeutes a éclaté en Papouasie-Nouvelle-Guinée face à l’escalade du coût de la vie et du mécontentement social.

Trotsky a réfuté la fausse théorie stalinienne du «socialisme dans un seul pays», et il n’y a aucune perspective socialiste à l’intérieur d’un seul archipel du Pacifique. De plus, il n’y a rien à négocier avec Macron et l’impérialisme français. Il faut déborder non seulement Macron mais aussi le FLNKS et ses alliés dans les appareils syndicaux et staliniens français, en bâtissant un mouvement international parmi les travailleurs contre l’impérialisme, la guerre et le capitalisme et pour le pouvoir ouvrier et le socialisme.

Loading