Samedi, David North, président du comité de rédaction international du World Socialist Web Site, s’est adressé à plus de 100 participants à un meeting tenu dans le cadre de la Foire du livre de Francfort sur le thème «Retour vers le futur : guerre, fascisme et lutte des classes au 21e siècle ».
Au cours des semaines précédentes, Mehring Verlag, la maison d'édition germanophone du WSWS, le Sozialistische Gleichheitspartei (SGP – Parti de l'égalité socialiste) et l'Internationale des jeunes et étudiants pour l'égalité sociale (International Youth and Students for Social Equality – IYSSE) ont collé des milliers d'affiches, distribué des dizaines de milliers de dépliants et organisé des centaines de discussions pour promouvoir cet événement important.
Dans son discours d'introduction, le président du SGP, Christoph Vandreier, a immédiatement souligné la signification politique de l'événement. Il a déclaré que, tandis que le président américain Joe Biden était à Berlin pour discuter avec le chancelier Scholz de l'escalade des guerres en Ukraine et au Moyen-Orient, David North représentait l'autre Amérique – «celle de la classe ouvrière, où l'opposition à la politique de guerre et au génocide à Gaza est aussi générale qu'en Europe».
North, membre dirigeant du mouvement trotskyste depuis plus de 50 ans, n'a pas seulement commenté le développement de la guerre au cours des dernières décennies, mais l'a activement combattue. Il l'a fait «toujours dans la perspective de développer un mouvement international de la classe ouvrière contre la guerre et de construire un parti révolutionnaire qui s'oppose avec une perspective socialiste à la folie capitaliste».
North représentait le marxisme de la Révolution d'Octobre et comprenait donc l'importance de fonder le travail révolutionnaire sur une compréhension précise des développements historiques et politiques, comme il l'a élaboré dans son livre Léon Trotsky et la lutte pour le socialisme au XXIe siècle, a poursuivi Vandreier. Il s'agissait donc de se concentrer sur la clarification des questions politiques, que North a abordées avec une clarté incomparable dans ses ouvrages, tels que La logique du sionisme (The Logic of Zionism) et Sonner l'alarme: le socialisme contre la guerre (Sounding the Alarm: Socialism Against War).
Ce dernier recueil présente les discours de North aux rassemblements du 1er mai au cours des 10 dernières années, qui, selon Vandreier, «mettent en garde avec force contre les développements auxquels nous assistons actuellement». Il a ajouté: «Beaucoup ne croyaient pas qu'il était possible que les puissances impérialistes soient, une fois de plus, prêtes à commettre un génocide, à risquer une guerre nucléaire et, finalement, à embraser le monde entier. Mais c'est exactement ce qui se passe aujourd'hui.»
North a commencé ses remarques en condamnant la guerre barbare menée par les puissances impérialistes et Israël. L'assassinat du chef du Hamas, Yahya Sinwar, était «un autre exemple de la désintégration totale des principes démocratiques au sein de ce qui se présente comme le centre de la démocratie mondiale. C'est une indication objective de l'effondrement du capitalisme américain et mondial, du soi-disant ordre démocratique, et de la descente du monde capitaliste dans la barbarie pure et simple.»
North a souligné que le premier procès d'Auschwitz s'était tenu dans la salle Fritz Bauer, lieu du meeting, il y a 60 ans. Il a déclaré qu'un jour viendrait où les responsables de la guerre génocidaire contre le peuple de Gaza seraient tenus responsables de leurs crimes.
Il a souligné que la vie de Sinwar, tout comme celle du peuple palestinien dans son ensemble, était marquée par l'oppression:
Il a consacré sa vie à la lutte contre cette oppression, et il a donné sa vie pour cela. En ce sens, son exemple est un exemple qui devrait être honoré. Mais en même temps, il est nécessaire de tirer les leçons de l'expérience du peuple palestinien et de tous les opprimés.
La leçon cruciale était qu'il ne peut y avoir de solution nationale à l'oppression nationale en dehors de la mobilisation de la classe ouvrière internationale.
North a expliqué :
C'est-à-dire que la leçon la plus fondamentale du trotskysme, qui a ses racines dans la théorie de la révolution permanente, est que la lutte nationale ne peut être résolue que par la lutte des classes, c'est-à-dire uniquement par la conquête du pouvoir, le renversement du système capitaliste et de toutes les atrocités de la barbarie impérialiste.
Le titre de l'événement avait été délibérément choisi, selon North :
Toutes les horreurs que nous observons aujourd'hui, les horreurs du génocide, la résurgence du fascisme, le danger de la guerre ressemblent aux réalités du 20e siècle, en particulier de la première moitié du 20e siècle, et plus spécifiquement des 31 années entre 1914 et 1945.
Les guerres en Ukraine et au Moyen-Orient faisaient partie d'un conflit mondial qui s'intensifiait, pour un nouveau partage du monde, a-t-il ajouté.
«Retour vers le futur», a-t-il poursuivi, signifie également qu'il est nécessaire de tirer les leçons du passé pour élaborer une perspective pour l'avenir. «Pour qu'il y ait un avenir, la classe ouvrière et les couches avancées de la jeunesse doivent retrouver une compréhension de l'analyse marxiste des lois du capitalisme», a déclaré North.
Les catastrophes du 20e siècle ne reposaient pas seulement sur de mauvaises intentions, mais sur les contradictions fondamentales du capitalisme: celles entre la production sociale et l'appropriation privée, et entre le caractère international du processus de production et le système des États-nations. «C'est la raison de tous les conflits géopolitiques menant à la guerre», a-t-il poursuivi.
Aujourd'hui, ces contradictions étaient encore plus explosives qu'il y a 100 ans, car les énormes progrès technologiques avaient encore renforcé l'intégration internationale de la production. Chaque marchandise industrielle était désormais un produit international, composé de pièces provenant du monde entier. En même temps, cela créait la base pour l'abolition du capitalisme.
Il poursuivit ainsi:
Si les capitalistes sont capables d'organiser la production à l'échelle mondiale pour faire du profit, pourquoi la classe ouvrière ne serait-elle pas capable de s'organiser à l'échelle mondiale pour mener la révolution mondiale? Les deux processus sont intimement liés l'un à l'autre.
Comme Trotsky l'avait noté deux mois avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, il n'y avait que deux solutions à la crise mondiale: la guerre ou la révolution. Il y avait eu la guerre, mais aussi des révolutions, qui avaient été trahies par le stalinisme et la social-démocratie.
North ajouta:
Nous sommes maintenant au 21ᵉ siècle et nous sommes confrontés à la résolution de problèmes qui n'ont pas pu être résolus au siècle dernier. Les dangers sont grands, mais il est également scientifiquement prouvé que les conditions objectives sont réunies pour surmonter ces problèmes. Mais cela exige au bout du compte que nous résolvions le seul grand problème à ne pas avoir été résolu au siècle dernier: le problème de la crise de la direction révolutionnaire.
En conclusion, il a souligné qu'il y avait eu de nombreuses attaques contre le Comité international de la Quatrième Internationale dans la période récente. L'historien britannique John Kelly a accusé les trotskystes, dans son livre Twilight of Trotskyism (Crépuscule du trotskysme), d'avoir une attitude du «tout ou rien» et de rejeter la possibilité du réformisme. «Eh bien, s'il y a un argument contre la perspective du réformisme, c'est bien l'état de la situation politique mondiale», a déclaré North.
Une énorme opposition est en train de se développer, mais aucune solution ne sera possible sans se baser sur le marxisme. North a conclu par un appel urgent:
Étudiez, lisez, comprenez les lois du développement. Tournez-vous vers la force révolutionnaire dans la société: la classe ouvrière, et construisez le parti révolutionnaire.
Dans la discussion qui a suivi, North a répondu à nombre de questions du public, notamment sur le rôle des facteurs subjectifs et objectifs dans l'histoire, la responsabilité du capitalisme dans le changement climatique et la montée du fascisme.
Une attention particulière a été accordée à l'élection présidentielle aux États-Unis, où le SEP (Socialist Equality Party – Parti de l'égalité socialiste), la section américaine du CIQI, présente ses propres candidats. Lorsqu'on lui a demandé comment il répondrait à l'argument selon lequel il fallait choisir le «moindre mal», il a déclaré que le mouvement révolutionnaire avançait une alternative à tous les partis de la réaction capitaliste.
En référence à ceux qui pensaient qu'il fallait voter Harris pour empêcher Trump, North a souligné qu'il était nécessaire de se demander d'où venait Trump. «Il est le produit d'une dégénérescence politique, sociale, économique et culturelle de notre pays.»
Il a déclaré :
Kamala Harris est elle-même pleinement associée au meurtre de masse. Est-elle le «moindre mal»? Le Parti démocrate est-il le «moindre mal», le parti qui propage la guerre contre la Russie, la guerre contre l'Iran et contre la Chine? Le parti de la CIA? Est-ce vraiment là un «moindre mal»?
Il a encore souligné:
Notre politique n'est pas axée sur des élections. Nous utilisons les élections dans un seul but: éduquer la classe ouvrière et montrer aux travailleurs la faillite du système politique. Notre objectif est d'éduquer politiquement la classe ouvrière et les jeunes, et de leur donner la compréhension nécessaire pour mener une lutte révolutionnaire systématique et soutenue contre le système existant.
Après l'événement, de denses discussions se sont poursuivies au stand des livres. De nombreux participants ont acheté des livres de David North et laissé leurs coordonnées pour contribuer à la construction du Parti de l'égalité socialiste.
(Article paru en anglais le 23 octobre 2024)