La Garde nationale déployée à Los Angeles tandis que la colère monte devant l’inaction du gouvernement qui a rendu les incendies possibles

La Garde nationale de Californie le long de l’autoroute Pacific Coast, tandis qu'un panache de fumée s'élève de l'incendie Palisades, le vendredi 10 janvier 2025, dans le quartier de Pacific Palisades à Los Angeles [AP Photo/John Locher]

Les six incendies qui font rage à Los Angeles ont fait plus de 12.000 victimes et au moins 11 morts. On estime que 180.000 personnes sont toujours sous le coup d'un ordre d'évacuation et que 166.800 autres font l'objet d'un avertissement d'évacuation alors que les pompiers continuent de lutter contre les incendies qui ont jusqu'à présent consumé environ 145 kilomètres carrés de la ville.

Les bâtiments qui ont brûlé comprennent des maisons, des églises, des écoles, des bibliothèques, une synagogue, des petits magasins, des banques, des restaurants et des monuments locaux. Selon les projections actuelles, les pertes économiques totales pourraient atteindre 150 milliards de dollars. On s'attend à ce que d'autres corps soient découverts, tandis que les chiens détecteurs de cadavres continuent de passer au peigne fin les ruines calcinées des anciens quartiers.

Jeudi, le gouverneur démocrate Gavin Newsom a déployé 400 soldats de la Gade nationale de Californie dans différents quartiers, établissant des points de contrôle et des barrages pour supposément mettre fin aux « pillages ». Selon le département du shérif de la région de Los Angeles, « ils nous aideront à contrôler la circulation et à protéger les infrastructures essentielles ».

Dans la pratique, ces mesures ont eu pour effet d'empêcher les personnes évacuées de vérifier l'état de leurs maisons et de récupérer leurs souvenirs. Un habitant d'Altadena a déclaré au WSWS : « Les incendies n'ont pas encore atteint ma maison, et ma femme et moi, ainsi que plusieurs autres couples, avons essayé de retourner chez nous pour récupérer nos affaires, mais nous avons été stoppés par la Garde nationale.

« Le bureau du shérif n'arrête pas de dire qu'il craint les pillards, mais quels pillards ? Les journaux ne cessent de parler des mêmes 20 arrestations. Nous avons eu de la chance que notre maison n'ait pas brûlé et nous voulons sauver ce que nous pouvons pendant que nous le pouvons. »

Un couvre-feu est également en vigueur, de 18 h à 6 h du matin, durant lequel toute personne se trouvant dans les zones incendiées peut être arrêtée.

Les deux incendies les plus importants, celui de Palisades et celui d'Eaton, ne sont encore circonscrits qu'à 8 % et 3 % respectivement. Les vents violents et soutenus du début de la semaine se sont quelque peu calmés, tombant à 32 km/h avec des rafales de 80 km/h, ce qui a facilité les efforts des 6200 pompiers sur le terrain. Le National Interagency Fire Center prévoit que les conditions environnementales continueront à s'améliorer au cours du week-end.

L'une des difficultés rencontrées dans la lutte contre les incendies réside dans le fait que le réservoir de Santa Ynez, situé à Pacific Palisades et d'une capacité de 440 millions de litres, est actuellement asséché et hors service, ce qui réduit les ressources en eau qui auraient pu être utilisées pour lutter contre les incendies. Cette situation est aggravée par le fait que la maire démocrate Karen Bass a réduit le budget du service d'incendie de Los Angeles de 17,6 millions de dollars, tout en augmentant le budget du service de police de Los Angeles de 126 millions de dollars.

Outre la menace directe que représentent les incendies, la fumée produite par des milliers de bâtiments et de véhicules en feu est extrêmement toxique et dangereuse. Des matériaux tels que les microplastiques, le mercure et le plomb, ainsi que les produits chimiques que sont le monoxyde de carbone, le benzène et les dioxines, sont très courants dans les incendies urbains.

Les particules que des millions de personnes respirent actuellement sont suffisamment petites pour atteindre les poumons et la circulation sanguine, augmentant ainsi le risque d'arrêts cardiaques, d'insuffisance cardiaque, d'asthme, d'accidents vasculaires cérébraux et d'autres problèmes liés à l'inflammation des poumons et à la présence de particules dans le cœur. Les masques sont désormais fortement recommandés à Los Angeles, en particulier ceux qui arrêtent les plus petites particules PM2,5, mais il n'y a pas d'effort coordonné de masse pour fournir des masques appropriés à la population.

Le campus médical Cedars-Sinai a déjà dû proposer davantage de rendez-vous aux patients souffrant de problèmes respiratoires dus à la fumée, en particulier d'asthme et de fibrose pulmonaire (cicatrisation des poumons largement incurable). En outre, de nombreuses cliniques ont été contraintes de fermer purement et simplement à cause des incendies, ce qui a encore aggravé la situation de l'infrastructure locale de soins de santé.

Les incendies mettent également en évidence l'impact du changement climatique causé par le capitalisme sur la société moderne, en particulier la dévastation accrue causée par les événements météorologiques extrêmes. En 2007, le quatrième rapport d'évaluation du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a mis en évidence le lien entre l'augmentation des températures mondiales et les phénomènes météorologiques extrêmes, notamment les vagues de chaleur, les sécheresses et les conditions propices aux incendies de forêt.

En 2021, le sixième rapport d'évaluation a établi un lien direct entre le changement climatique et le risque accru d'incendies de forêt. Il a mis en évidence des incendies de forêt records, dont l'incendie meurtrier Camp Fire en 2018, et a souligné le rôle du changement climatique dans l'apparition de ces incendies.

Les tendances climatiques annoncées dans les rapports d'évaluation se sont poursuivies sans relâche. Vendredi, le service européen Copernicus sur le changement climatique a confirmé que 2024 était l'année la plus chaude jamais enregistrée et la première année civile complète au cours de laquelle la température mondiale moyenne a dépassé de 1,5 degré Celsius son niveau préindustriel. L'année a également été plus chaude de 0,12 degré Celsius que 2023, l'année la plus chaude jamais enregistrée.

Les données utilisées par Copernicus remontent à 1850 et les températures enregistrées entre 1850 et 1900 lui servent de référence. Depuis lors, la combustion de combustibles fossiles – charbon, pétrole et gaz naturel – n'a cessé d'augmenter la concentration de dioxyde de carbone dans l'atmosphère terrestre, entraînant une hausse correspondante de la température moyenne mondiale.

C'est au cours des dix dernières années que ces augmentations de température ont été les plus marquées. Les années 2015-2024 ont été les dix années les plus chaudes jamais enregistrées. L'année dernière a été l'année la plus chaude pour tous les continents, à l'exception de l'Antarctique et de l'Australie. C'est également l'année la plus chaude dans des parties importantes de l'océan Atlantique Nord, de l'océan Indien et de l'ouest de l'océan Pacifique.

La forte augmentation de la température de l'air a également entraîné une hausse de la température de 0,51 degré Celsius dans les océans équatoriaux et à latitude moyenne. L'augmentation de la température des océans a notamment provoqué un blanchiment massif des coraux, qui menace à la fois les écosystèmes océaniques critiques, mais aussi l'ensemble de l'écologie de la Terre par un effet de cascade.

À Los Angeles, l'un des effets de ces températures plus élevées a été une sécheresse qui dure depuis huit mois. En règle générale, la région connaît une saison des pluies qui commence vers le mois de novembre, mais celle-ci n'a pas encore commencé. La ville souffre donc actuellement de conditions particulièrement sèches qui ont alimenté les incendies.

Les dangers posés par une augmentation aussi rapide de la température mondiale sont immenses, comme le montrent les incendies de Los Angeles ainsi que les récents ouragans Milton et Helene qui ont ravagé le sud-est des États-Unis à la fin de l'année dernière. Il s'agit notamment de vagues de chaleur plus longues, de sécheresses plus intenses, de précipitations plus abondantes, d'ouragans et de cyclones plus puissants, d'incendies de forêt plus importants, de tempêtes plus violentes, de vortex polaires, d'inondations côtières et de marées et de la fonte des glaciers et du pergélisol : autant de problèmes que le capitalisme s'est révélé incapable de réduire, et encore moins de résoudre.

(Article paru en anglais le 11 janvier 2025)

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